Retrouvez l’interview de Mélanie Clénet en intégralité, ici : Mélanie, designer textile et costumière
Photographies : Rémy Lidereau pour Étonnantes
Elle a fait du tissu son langage, sa langue courante dont le vocabulaire sensoriel exprime un savoir-faire, questionne une technique ; dont les verbes se conjuguent au plus-que-parfait, forcément. Coudre, assembler, réinventer. Jusqu’à anoblir le coton, lui donner des reflets d’or, faire de la corde, la matière première à des créations d’exception. Mélanie l’équilibriste jongle au quotidien entre son métier de costumière qu’elle exerce depuis une quinzaine d’années et son activité de designer textile initié il y a huit ans. Pour le premier, elle réalise à la demande de diverses compagnies, des costumes pour le théâtre, le cirque ou la danse contemporaine. Pour la seconde, elle décide elle-même de l’allure et de l’avenir à donner à cette corde qu’elle aime et maitrise tant. « Tout est parti d’une technique que j’ai mise en place pour une compagnie de cirque : je voulais intégrer les cordes du spectacle sur les costumes. Je me suis mise à assembler la corde avec la machine à coudre. Au départ, je l’avais cousue en rond pour en faire un élément de corseterie qui venait au-dessus du costume, puis j’ai commencé à l’assembler pour en faire un plateau pour un spectacle ou un cadeau de fin de représentation. »



Les bases de son univers sont posées, une rencontre fera le reste : la marque de prêt-à-porter Des Petits Hauts remarque les créations poétiques de Mélanie et lui passe commande pour les exposer au sein des points de vente de son réseau de distribution.
« Depuis quelques années, la marque intègre des créateurs à des évènements éphémères au sein de ses propres boutiques. L’équipe m’a demandé différentes choses dont des pièces murales. Cela m’a fait travailler ma technique. » Alors Mélanie travaille, enrichit son langage artistique et conjugue ses verbes fétiches au présent, au futur. Coudre, assembler, réinventer. « Quand on est dans un domaine et qu’on commence à maitriser certaines choses, c’est assez jouissif de se demander comment on peut aller plus loin avec ça ». Sous ses doigts, la corde explore de nouveaux horizons : elle devient luminaire, contenant ou tapisserie ; elle se pare de fils bleus ou dorés ; elle se révèle délicate et précieuse, unique. « La corde est blanche et je la couds avec le fil qui donne la couleur. Ensuite, j’ajoute un fil en lurex qui donne l’aspect brillant, joue avec la lumière et de loin, donne l’impression d’une matière plus céramique. »



La matière : c’est elle qui inspire Mélanie Clénet au quotidien, lui souffle les énigmes techniques à résoudre. Comment conférer à une corde la délicatesse d’une céramique ? Comment offrir au coton la brillance de la soie ? Comment donner à la matière une nouvelle allure, différente de ce qu’elle n’est réellement ? « C’est un vrai parti pris lié à ma culture familiale, de trouver des subterfuges pour arriver à un résultat qui pourrait s’apparenter à des matières plus nobles. » La notion de costume n’est finalement jamais très loin… Pourtant Mélanie doute et se questionne sur le rapport qu’entretiennent ses deux activités, qu’elle juge si distinctes l’une de l’autre. « Quand on fait des choses complètement différentes, on a parfois l’impression qu’on s’éparpille, qu’on ne sait plus vraiment ce que l’on fait. En costume, je réponds à une demande et à un cahier des charges esthétique et technique défini par la thématique du spectacle. Pour mes créations, je réponds à un cahier des charges que je définis moi-même et qui est très simplifié : quand je fais un objet, c’est une corde, un fil, une machine à coudre et un savoir-faire au niveau du geste. »




Mais c’est bien la richesse de son parcours justement, qui offre à Mélanie les ressources pour continuer à se renouveler. « Je travaille seule sur mes créations tandis que pour le spectacle vivant, je suis avec une troupe, je fais des rencontres. C’est bien que je continue à me nourrir en travaillant avec d’autres personnes. » Elle espère ainsi pouvoir collaborer à l’avenir avec des architectes d’intérieurs qui verraient en ses créations toutes leurs possibilités « sur les surfaces, les formes qui peuvent être assemblées, sur la gamme colorée. » Dans son langage désormais, de nouveaux verbes : contacter, démarcher, relancer. Mélanie sait qu’elle n’a d’autre choix que de les conjuguer au présent pour étendre sa marque, trouver des clients potentiels.
Sur un mur de son atelier, une citation de Nelson Mandela : « Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends. » En bonne équilibriste, Mélanie Clénet continue d’avancer sur le fil qu’elle tisse au quotidien entre ses deux vies professionnelles. Sans trébucher.



Retrouvez les créations de Mélanie Clénet
sur son site internet : melanieclenet.com
et son compte Instagram : @melanie.clenet
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